« La méditation n’est pas une évasion mais une rencontre sereine avec la réalité » (Nhat Hanh Tich, Le miracle de la pleine conscience, Paris – Edition L’espace bleu, 1996).
Selon Carrie Barron, professeure en psychiatrie à l'Université de Columbia, le tricot a des bienfaits similaires à la méditation.
Faire du crochet, ou du tricot, c’est se concentrer sur le mouvement régulier et répétitif de la réalisation des mailles, de la même manière qu’on se concentre sur la respiration dans la méditation. Enchainer les mailles de l’ouvrage oblige à être pleinement focalisé sur le moment présent. Il est alors possible d’observer ce qui se passe en soi (respiration, sensations corporelles, flot incessant de pensées…) et autour de soi (sons, odeurs…).
Lorsque la technique du crochet est maîtrisée et les automatismes acquis, on peut accueillir les pensées qui traversent l’esprit sans s’attacher à aucune, en les laissant passer, sans jugement. Cela permet d’échapper à la préoccupation permanente du futur, anxiogène ou du passé, parfois associé à des émotions douloureuses et de réguler les émotions.
Comme dans la méditation, il ne s’agit pas de faire le vide dans sa tête ni de faire taire le bavardage de l’esprit, mais de l’observer sans s’identifier à lui, ni le laisser nous emporter. On peut alors modifier notre rapport aux pensées négatives pour mieux les tolérer, moins se laisser influencer par elles, et reprendre le contrôle en les laissant s’exprimer. Le but étant d’apprivoiser ses émotions, d’en identifier les nuances afin de mieux les moduler.
La méditation est une pratique qui vise la relaxation, l’apaisement du mental, la paix intérieure, ou l’atteinte d’états modifiés de conscience en se concentrant sur un objet d’observation intérieur (respiration, répétition mentale d’un mantra) ou extérieur (objet ou symbole).
A l’origine spirituelle et religieuse, la méditation est aujourd’hui pratiquée en occident sous une forme « laïque » appelée « pleine conscience » traduction de « mindfullness ». Codifiée et évaluée par le psychologue américain Jon Kabat-Zin et le psychiatre canadien Zindel Segal, la méditation de pleine conscience a fait l’objet d’un nombre important d’études scientifiquement valides qui ont démontré son intérêt dans des domaines variés tels que le stress, la cardiologie, les douleurs chroniques, la dermatologie et les troubles respiratoires, ainsi qu’en psychiatrie et en neuro-immunologie.
Extrait d’un article du hors-série « Science et Avenir » de janvier février 2019 :
« Chez les personnes dépressives, la méditation MBCT (thérapie cognitive par la pleine conscience), se révèle aussi efficace qu’un antidépresseur dans la prévention des récidives. Plus généralement la méditation de pleine conscience produirait les mêmes effets que les traitements de référence dans la gestion des troubles anxieux. En outre, sa pratique régulière modifie de façon significative l’activité cérébrale, avec un effet protecteur sur le cerveau : elle développe la plasticité neuronale tout en augmentant l’épaisseur du tissu du cortex préfrontal gauche, impliqués dans les processus cognitifs et émotionnels ainsi que dans la sensation de bien-être. Enfin cette pratique mentale ralentirait la diminution- inéluctable avec l’âge – du volume de l’encéphale, autrement dit de l’espace occupé par notre matière grise, qui contient les corps cellulaires des neurones. Un atout contre le déclin cognitif. Attention cependant : la méditation a parfois des effets indésirables (contre indiquée en cas de psychose et dépression sévère). »
A ma connaissance, il n’y a pas suffisamment d’étude qui, à ce jour, permette d’affirmer que faire du tricot ou du crochet puisse être exactement équivalent à la pratique de la méditation. Il ne serait pas rigoureux scientifiquement d’extrapoler que la pratique du crochet et du tricot puisse présenter les mêmes avantages sur la santé que la méditation, même si il est tentant de faire des comparaisons et facile de trouver des similitudes frappantes. Peut-être qu’un jour des équipes de recherche se pencheront sérieusement sur la question et pourront établir une corrélation certaine. Il ne serait pas étonnant que les avantages du tricot et crochet puissent être même supérieurs à ceux de la simple méditation puisque s’y ajoutent, comme nous l’avons vu, les effets de la mobilisation coordonnée des mains et des doigts ainsi que les stimulations sensorielles au niveau du toucher et le bénéfice pour l’estime de soi grâce à la réalisation d’un objet concret de ses propres mains.
La prochaine fois que vous entamerez un ouvrage au crochet, faites-le avec l’intention de méditer en pleine conscience. Eteignez votre téléphone, ne vous installez pas devant la télévision mais confortablement dans le calme, avec éventuellement une musique douce de relaxation, puis concentrez-vous sur vos mailles en respirant lentement. Lorsque le travail est commencé, prêtez attention à vos sensations : la douceur de la laine utilisée, sa couleur, son odeur, la sensation du crochet entre vos doigts, est-il froid comme ceux en métal ? Est-il lourd ou léger, est-il doux et tiède comme ceux en bois ou en bambou? Est-ce qu’il fait chaud, quels sont les bruits que j’entends, les odeurs que je sens, la luminosité etc. Mais restez observateurs de ces sensations, ne les laissez pas entrainer votre mental vers des réflexions sans fin. Si des pensées arrivent, observez-les, puis laissez les filer. Vous devrez peut-être à plusieurs reprises vous concentrer de nouveau sur vos mailles pour compter, tourner l’ouvrage ou changer de couleur. Soyez présent autant que possible à ce que vous faites. Puis reprenez le fil de votre méditation et de votre crochet, en prêtant attention à vos sensations.
Certaines personnes ont du mal à rester assises et se concentrer simplement sur leur respiration pour méditer. Ces réfractaires à la méditation habituelle, pourraient cependant trouver dans la pratique du crochet, un moyen de bénéficier des avantages de la méditation sur leur bien-être et leur santé. Cette forme de méditation « active » en quelque sorte leur donnera aussi la satisfaction d’avoir produit quelque chose et de ne pas être « resté à rien faire ». De la même façon, on peut méditer en marchant, en nageant ou en enchainant des postures de yoga.
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